Les coûts irrécupérables qui nous font souffrir inutilement. Vous avez acheté deux billets à 150$ le siège pour un spectacle qui s’annonce inoubliable. À l’entracte, votre invité et vous réalisez que vous vous êtes trompés. C’est, somme toute, un spectacle intenable. Vous hésitez à quitter sur le champ ayant « investi » tant de sous pour ces billets. Une compagnie entreprend un projet de 2 millions $. À mi-chemin, après avoir investi 1 million $, elle réalise que la rentabilité de cet investissement sera considérablement inférieure à ce qui était prévu en première instance. La direction songe tout de même à le compléter incapable d’accepter qu’autrement une somme de 1 million $ sera « perdue à jamais ». Les États-Unis ont hésité longuement avant de se retirer de la guerre au Vietnam même s’il était évident qu’ils n’allaient jamais la gagner. La raison : nous avons investi tant dans cette guerre et tous ces efforts seront perdus.
Dans ces trois exemples, les gens sont victimes d’une erreur, celle des coûts irrécupérables, auxquels ils attribuent une valeur. Je trouve que la langue anglaise est plus claire concernant ce que j’essaie de décrire, soit l’expression « sunk cost fallacy ».
Bien sûr, il pourrait y avoir une raison de rester au spectacle pour la seconde moitié, peut-être que le programme prévu est différent comme concept de la première demie. Mais le coût des billets ne devrait pas être parti de l’équation ou pertinent. Quant au projet, on pourrait vouloir le poursuivre en changeant la conception de ce projet pour assurer la rentabilité et récupérer une partie des équipements déjà achetés. Mais le fait qu’un million $ furent investis, en soi, n’est pas une justification. Quant à la guerre au Vietnam, sa prolongation a sans doute causé beaucoup de souffrance inutile dans les « deux camps » peu importe les efforts passés, avec, en bout de piste, le repli américain.
Pour un investisseur, l’erreur des coûts irrécupérables est souvent en arrière-scène dans les réflexions qui suivent la découverte d’un placement « problématique ». On hésite à ignorer ce que cet investissement a coûté. Logiquement, tout ce qui compte se rapporte au futur. Imaginons que « A » a reçu de son oncle des actions de la compagnie BASFY, la plus grande société de chimie au monde. Dans un sens, « A » pourrait bien considérer que le coût de ses actions est zéro. « A » se sent très à l’aise à les vendre « étant donné qu’elles ne lui ont rien coûté ». « B » a payé ses actions BASFY un prix à l’achat de 20 USD. Le prix courant du titre est de 13 USD. Il hésite à vendre compte tenu que ces actions lui ont coûté « tellement chères ».
Dans les deux cas, vous aurez compris que la décision de vendre ou de ne pas vendre ne doit pas être basée sur le coût d’achat. Examinez le futur, dirons-nous à A et à B.
Voici des raisons pour conserver les actions de BASFY : la juste valeur selon notre analyste préféré est de 18 USD (titre à rabais présentement), la réduction des ventes est temporaire et celles-ci retourneront à la progression typique des Produits Intérieurs Bruts dans les pays ou la société opère, BASFY a des avantages concurrentiels, les dividendes sont généreux, le concept d’usine de BASFY (appelé Verbund) est très performant dans toutes ses 6 usines et le projet d’une nouvelle usine similaire en Chine est prometteur, le focus sur les produits de spécialité (par rapport aux produits communs) réduira la proportion des profits victimes des cycles économiques mondiaux. Dans une politique de diversification, il est important de détenir des titres dans le domaine de la chimie et BASFY est certainement un joueur important et difficile à ignorer.
Voici des raisons pour vendre BASFY : le concept d’usine de BASFY peut être répliqué, le prix de la matière première (les hydrocarbures) est incertain et peut réduire à la longue la marge de profit de BASFY si la société n’arrive à pas refiler ces coûts à ses clients, d’autant plus que l’avantage « usine » est fonction du prix de la matière première. Dans une politique de diversification, il existe d’autres sociétés dans le domaine de la chimie qui pourraient laisser une empreinte suffisante dans le portefeuille en l’absence de BASFY et être plus profitables.
En rapport avec cette dernière raison, on doit se demander s’il y a présentement une autre occasion d’investissement qui surpasse BASFY en termes de potentiel qui pourrait accueillir les liquidités dans le cas ou les actions de BASFY seraient vendues.
En somme, on voit bien que le coût d’achat n’est pas pris en compte dans ces décisions et n’a pas à être un facteur. Le futur de BASFY et sa place dans la politique de placement sont les éléments pertinents. Une meilleure alternative doit être identifiée pour remplacer BASFY s’il faut se départir de ce placement.
Je vous rappelle que je suis un investisseur. Je partage ma stratégie d'investissement dans le but de vous aider à réfléchir et développer votre propre stratégie.
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